Suisse

non renouvellement de l’Accord de Reconnaissance Mutuelle avec l’UE : ajustements ou réel bouleversement?

Suisse – non renouvellement de l’Accord de Reconnaissance Mutuelle avec l’UE : ajustements ou réel bouleversement?

Depuis 2002, un accord de reconnaissance mutuelle (ARM) liait l’Union Européenne et la Suisse pour faciliter leurs échanges bilatéraux : la Directive 93/42/CEE et la Directive 90/385/CEE relatives aux dispositifs médicaux (DM) et aux dispositifs médicaux implantables actifs (DMIA) étaient couvertes par cet ARM.  En raison du contexte politique général (abandon des négociations concernant l’accord-cadre institutionnel entre la Suisse et l’UE), la Commission européenne n’a pas poursuivi la mise à jour de l’ARM qui s’imposait à partir du 26 mai 2021, date d’application du Règlement (UE) 2017/745 (RDM).

Mais alors quelles sont les conséquences de ce « Swixit » sur le paysage règlementaire des dispositifs médicaux ? Et comment continuer à commercialiser les DM dans ce contexte ?

nexialist fait le point, dans les deux sens !

 

Quelles sont les conséquences de ce non-renouvellement d’ARM pour les fabricants européens qui souhaitent mettre leurs dispositifs sur le marché suisse ?

Afin de garantir l’approvisionnement de la Suisse en dispositifs médicaux sûrs et performants, le Conseil fédéral helvétique a pris plusieurs mesures d’atténuation en 2021.

En premier lieu, la règlementation Suisse relative aux DM a été modifiée pour tenir compte du RDM. L’Ordonnance révisée sur les dispositifs médicaux (ODim) est entrée en vigueur le 26 mai 2021.

En deuxième lieu, la Suisse reconnaît de manière unilatérale les certificats de conformité délivrés par les organismes notifiés de l’UE. Et la bonne nouvelle, c’est que les certificats de conformité à la Directive 93/42/CEE ou à la Directive 90/385/CEE sont également reconnus. En effet, les legacy devices bénéficient de dispositions transitoires selon les mêmes conditions et échéances que celles précisées à l’article 120 du Règlement européen.  Cela signifie que les dispositifs munis de certificat de conformité à la Directive pourront continuer à être mis à disposition sur le marché suisse jusqu’à échéance du certificat et au plus tard jusqu’au 26 mai 2024.

Inutile donc de switcher vers un organisme notifié suisse… Toutefois, plusieurs actions doivent être menées par les fabricants européens pour continuer à commercialiser leurs dispositifs en Suisse :

Désignation d’un mandataire suisse (CH-REP)

Le fabricant européen doit établir un mandat avec un mandataire basé en Suisse.

Le mandataire suisse sera notamment en charge des formalités de mise sur le marché auprès de l’autorité compétente suisse (Swissmedic), et des activités liées à la sécurité des DM. Ses droits et obligations sont précisés aux articles 51 et 52 de l’ODIM, qui renvoient eux-mêmes aux articles 11 et 12 correspondants du RDM. Il devra enregistrer son activité auprès de Swissmedic afin d‘obtenir un CHRN (numéro d’enregistrement suisse).

La désignation d’un importateur

Inévitablement, l’opérateur économique qui met sur le marché pour la première fois un dispositif sur le marché suisse devient un « importateur » et doit respecter les obligations qui lui incombent au titre de l’ODIM (articles 53 et 55 qui renvoient aux articles 13, 16, 30 et 31 du RDM). A l’instar du mandataire et du fabricant, l’importateur a l’obligation d’enregistrer son activité auprès de Swissmedic en vue de l’obtention du CHRN.

Mise à jour de l’étiquetage

Qui dit nouveaux opérateurs économiques impliqués dit impact sur l’étiquetage ou sur les documents accompagnant le dispositif. Les modalités d’indication du mandataire suisse et de l’importateur dépendent de la règlementation appliquée :

  • Pour les dispositifs conformes au Règlement (UE) 2017/745 :
    • Le mandataire suisse doit être indiqué sur l’étiquette. Toutefois, pour les dispositifs de classe I, un délai de transition jusqu’au 31 juillet 2023 est prévu pour la mention du mandataire suisse sur l’étiquette. Jusqu’à cette date, l’indication du mandataire sur un document accompagnant le dispositif (comme le bon de livraison par exemple) est également acceptée.
    • L’importateur doit être indiqué sur le dispositif ou sur son emballage ou sur un document accompagnant le dispositif.
  • Pour les dispositifs conformes à la Directive 93/42/CEE :
    • Le mandataire suisse doit être indiqué sur l’étiquette ou dans le mode d’emploi ou sur un document accompagnant le dispositif.
    • L’importateur doit être indiqué sur le dispositif ou sur son emballage ou sur un document accompagnant le dispositif.
  • Pour les dispositifs conformes à la Directive 90/385/CEE :
    • Le mandataire suisse doit être indiqué sur l’emballage commercial et dans le mode d’emploi.
    • L’importateur doit être indiqué sur le dispositif ou sur son emballage ou sur un document accompagnant le dispositif.

  Enregistrement des dispositifs et des opérateurs économiques

Le non-renouvellement de l’accord de reconnaissance mutuelle ne permet plus aux opérateurs économiques de réaliser les différents enregistrements sur la base de données européenne Eudamed. Swissmedic a donc développé sa propre base de données nommée Swissdamed, pour Swiss Database on Medical Devices, original n’est-ce pas ?

Concernant les caractéristiques techniques de la plateforme, peu d’informations ont pour le moment été données mais nous savons déjà qu’elle sera composée de deux modules interconnectés relatifs aux DM et aux opérateurs économiques. Une page web en accès libre sera également disponible. De plus, en raison de la similarité entre les exigences européennes et suisses, les informations à renseigner seront a priori équivalentes à celles des modules correspondants d’Eudamed.

A noter que les opérateurs économiques qui se sont déjà enregistrés auprès de Swissmedic et qui ont par conséquent obtenu un numéro d’enregistrement unique suisse (CHRN) n’auront pas besoin de s’enregistrer dans Swissdamed.

L’entrée en application de l’exigence d’enregistrement dans Swissdamed n’est pas prévue pour tout de suite ! En effet, ce n’est qu’après une modification de l’ODim que les enregistrements dans Swissdamed deviendront obligatoires, le lancement opérationnel étant prévu pour 2023.

Vous souhaitez en savoir plus sur les obligations du mandataire suisse et de l’importateur ? Rendez-vous sur l’aide-mémoire de Swissmedic !

Quelles sont les conséquences de ce non renouvellement d’ARM pour les fabricants suisses qui souhaitent mettre leurs dispositifs sur le marché de l’UE ?

L’UE ne reconnaît plus les certificats émis par les organismes notifiés suisses, y compris ceux émis avant le 26 mai 2021 (délivrés dans le cadre de l’ARM). Cela signifie que les dispositifs munis d’un tel certificat doivent faire l’objet d’une certification par un organisme notifié de l’UE pour pouvoir continuer d’être commercialisés au sein de l’UE.

Par ailleurs, la Suisse étant désormais considérée comme un « état tiers », les fabricants suisses doivent désigner un mandataire européen pour pouvoir importer leur dispositif en UE.

Si les dispositifs sont couverts par des certificats émis par des organismes notifiés établis dans l’UE délivrés dans le cadre de l’ARM, ces derniers restent valables à condition qu’un mandataire établi dans l’UE soit désigné.

De la même manière que dans la situation inverse, l’opérateur économique qui met sur le marché pour la première fois un dispositif sur le marché européen devient un « importateur » et doit respecter les obligations qui lui incombent au titre du Règlement (UE) 2017/745.

En termes d’impact sur l’étiquetage :

  • Le nom et l’adresse de l’importateur doivent figurer sur le dispositif, le conditionnement ou dans un document accompagnant le dispositif
  • Le nom et l’adresse du mandataire doivent figurer sur l’étiquette

Enfin, l’enregistrement des dispositifs et des opérateurs économiques (fabricant suisse, mandataire européen et importateur) devra être réalisé dans la base de données Eudamed. 

Le non-renouvellement de l’ARM a-t-il un impact dans d’autres types de situations ?

Les fabricants situés dans d’autres pays tiers à l’UE (par exemple, Canada ou Etats-Unis) qui avaient jusqu’alors un mandataire européen présent sur le sol suisse vont devoir désigner un autre mandataire localisé au sein de l’UE.  

Pour conclure

Si la non-reconduction de l’ARM n’est pas une entrave à la libre circulation des dispositifs médicaux entre la Suisse et l’UE, elle demande aux opérateurs économiques un certain nombre d’adaptations. La nouvelle réglementation suisse, forte de son inspiration européenne avec ses multiples renvois au RDM et la mise en place de dispositions transitoires, limite les effets de ce « Swixit » et facilite grandement le changement.

Si vous souhaitez en savoir plus à ce sujet, n’hésitez pas à nous contacter via nos réseaux ou notre formulaire de contact sur notre site internet.

Suivez-nous sur